• Mohamed Lakhdar Hamina

     

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    Mohamed Lakhdar Hamina a tout juste vingt ans quand éclate la guerre de libération.
    Natif de Sétif, il commence ses études en Algérie, puis part les terminer en France. Au lycée Carnot de Cannes, il partage le pupitre du fils d'un directeur de la photo et se prend d'intérêt pour le cinéma. Appelé sous les drapeaux français en 1958, il déserte, rejoint la résistance algérienne à Tunis et c'est au maquis qu'il tourne ses premiers films. " Quand je suis arrivé là-bas on m'a demandé ce que je savais faire, j ci dit que j'étais cinéaste ". En 1959, il est envoyé par le FLN à Prague pour sui­vre des études à l'école de cinéma, la FAMU, où il se spécialise dans la
    prise de vue. Entre temps, il fait plusieurs séjours à Tunis où il tourne avec Djamel Chanderli Yamina, Le
    Voix du peuple et Les Fusils de la liberté. Après l'indépendance, il rassemble ses anciens collaborateurs
    de Tunis pour jeter les bases de ce qui va devenir l'Office des actualités algériennes dont il devient le
    directeur de 1963 à sa dissolution en 1974.
    Enfant de la révolution, Mohamed Lakhdar Hamina n'aura de cesse de filmer pour dénoncer les condi­tions et l'histoire de ces hommes qui ont lutté pour l'indépendance. En 1965, il tourne son premier long-métrage Le Vent des Aurès, l'odyssée d'une femme partie à la recherche de son fils emprisonné pendant la guerre, une histoire inspirée de celle de sa grand mère. L'actrice Kheltoum interprète cette "mère courage" devenue un symbole pour tous les Algériens. Couronné du Prix de la première ooeuvre au festival de Cannes en 1967, Le Vent des Aurès est le premier film algérien qui consacre la présence du jeune cinéma sur la scène internationale. " Le Vent des Aurès s'organise en poème de la terre algé­rienne, à coup d'images larges et simples " écrivait le critique de cinéma Jean-Louis Bory.
    L'année suivante, il tourne Hassen Terro. D'un tout autre genre ce film emprunte à la veine comique pour pasticher la guerre d'Algérie à travers les mésaventures d'Hassen, un petit-bourgeois, qui est entraîné mal­gré lui dans le feu de l'action révolutionnaire. Antihéros, froussard et vantard, Hassen est interprété par le formidable Rouiched, dont la popularité égalait celle de Fernandel. Avec ce film, Lakhdar Hamina acquiert une popularité sans précédent auprès des spectateurs algériens qui aujourd'hui encore ne se lassent pas de l'interprétation de Rouiched sur le petit écran.
    Dans Décembre, son troisième long-métrage sorti en 1972, Lakhdar Hamina aborde la torture en s'ins­pirant de l'histoire de son père, mort sous les sévices. A Alger, un des responsables du FLN est arrêté par l'armée qui emploie les méthodes les plus violentes pour faire parler les prisonniers. Le recours à la torture pose un cas de conscience à un officier français. Jouant sur le champ-contre-champ, entre le torturé et son tortionnaire, dans un huis clos étouffant, Lakhdar Hamina aère son film avec des retours en arrière sur l'enfance du prisonnier qui annoncent son prochain film.
    Et en 1974, c'est Chronique des années de braise, grande fresque historique qui nous entraîne dans ces années d'après l'indépendance. "Avec ce film, ]*'avais eu envie d'expliquer pour la première fois comment est arrivée la guerre d'Algérie. Cette révolte, qui est devenue la révolution algérienne, est non seulement contre le colonisateur, mois aussi contre la condition de l'homme ." dit Mohamed Lakhdar Hamina qui ajoute " Mon film n'est qu'une vision personnelle même s'il prend appui sur des faits précis ".
    Partagé en six tableaux, depuis les premiers mouvements de résistance jusqu'à l'insurrection de 1954, le film est une magnifique épopée d'une grand force visuelle. II suscite une polémique en Algérie sur le budget qui lui a été alloué. Il n'en remporte pas moins la Palme d'or à Cannes en 1975, unique récompense connue à ce jour pour un film venu du continent africain.
    Mohamed Lakhdar Hamina signe ensuite deux films : Vent de sable en 1982, sur une communauté rura­le isolée malmenée par une nature violente dans laquelle se mire le rapport entre les hommes domi­nateurs et les femmes puis La Dernière Image, en 1985.
    Du réalisme poétique du Vent des Aurès à l'humour de Hassen Terro, du face à face humaniste de Décembre jusqu'à la grande fresque de Chroniques des années de Braise, la guerre d'Algérie n'a cessé d'inspirer les quatre premiers films de Mohamed Lakhdar Hamina.

     

    Par Benjamin Stora - Historien

     




    Commençons par le cinéma algérien qui naît, essentiellement, après l'indépendance des années 1960. Pendant la guerre, par l'absence d'image du côté des Algériens, comparée à celle des images officielles de l'armée française, est signi­ficative du déséquilibre du conflit entre les armées régulières d'un Etat puissant, et des maquisards. Les films militants, tournés du côté algérien, de René Vautier (L'Algérie en flemme) ou Yann Le Masson (J'ai 8 ans) sont soumis à la censure officielle et ne sont pas distribués en salles. Après l'indépendance de 1962, se voulant en rupture avec le cinéma colonial pour qui « l'indigène » apparaissait comme un être muet, évoluant dans des décors et des situations « exotiques », le cinéma algérien témoigne d'abord d'une volonté d'existence de l'Etat­nation. Les nouvelles images correspondent au désir d'affirmation d'une identité nouvelle. Elles se déploient d'abord dans le registre de la propagande, puis, progressivement, dévoi­lent des « sujets » de société.
    A l'origine du cinéma algérien, il y a cette question des films « vrais », « authentiques », celle de l'équilibre fragile entre la nécessité de raconter la vraie vie du colonisé et le besoin de s'échapper du ghetto identitaire construit par l'histoire coloniale. Entre sentimentalisme exa­cerbé et discours politiques, les premières histoires ont le mérite de rendre compte que les gens ne sont pas seulement en guerre contre un ordre ou soumis à lui, mais aussi se par­lent et même se racontent des histoires personnelles. Dans les années 1970, Mohamed Lakhdar Hamina s'empare du thème avec Le Vent des Aurès, tourné en 1965, l'histoire d'un jeune qui ravitaille des maquisards, se fait arrêter, et que sa mère recherche désespérément dans les casernes, les bureaux, les camps d'inter­nement. Décembre, sorti en salles en 1972, montre la capture de Si Ahmed et « interrogé » par les parachutistes français. Chronique des années de braise (palme d'or au festival de Cannes 1975) qui ne traite pas directement de la guerre d'indépendance, son récit s'ar­rêtant à novembre 1954, alternent les scènes de genre (la misère de la vie paysanne) et recherche d'émotion portées par des personnages fragilisés (une famille emportée dans la tourmente de la vie coloniale). Patrouille à l'Est d'Amar Laskri, (1972), Zone interdite d'Ahmed Lallem, (1972) ou L'Opium et le bâton, d'Ahmed Rachedi, sont autant de titres programmes qui, sur le front des images, dessinent le rapport que les autorités algérien­nes veulent entretenir avec le « peuple en marche ». Le cinéma algérien examine, fouille alors dans le passé proche, mais il n'y a pas d'image première de référence. Tout est à reconstruire à partir de rien. Quelque chose relève ici de l'insolence des pionniers, ceux pour qui tout n'est que (re)commencement. Cette image sans passé (il n'y a rien sur les figures anciennes du nationalisme algérien, de Messali Hadj à Ferhat Abbas, ou de Abane Ramdane à Amirouche) cache peut être aussi la hantise de se voir dévoré par des ancê­tres jugés archaïques. Ce cinéma décomplexé vis-à-vis d'aînés peut donc avancer rapide­ment, et la production première de films sur la guerre d'indépendance est importante. L'absence de mélancolie apparaît comme une différence centrale avec les films français sur l'Algérie et la guerre, travaillés quelquefois par les remords, et la sensation permanente d'oubli.... Car il existe une perpétuelle sensation d'absence de films français de cinéma de fiction sur la guerre d'Algérie.


    Le vent des Aures.
    Algérie 1996 >1h30 >couleurs>vostf

    R&alisation: Mohamed Lakhdar Hamina.

     

     

     

     

     

     

     

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