• Hachemi Zertal, producteur et distributeur algérien

    Hachemi Zertal, producteur et distributeur algérien

    « Il faut des salles de cinéma dignes de ce nom en Algérie »

    Algérie

    Hachemi Zertal, producteur et distributeur algérien

    Producteur, distributeur, Hachemi Zertal reste un inconditionnel du cinéma, fidèle à lui-même, à des principes qu’il juge inaliénables. À travers un réquisitoire sévère et attristé sur l’état des salles de cinéma en Algérie, il évoque, pour Le Provincial, le 7ème Art, qui est toute sa vie.

    Depuis 1962, le nombre de salles de cinéma a baissé de façon dramatique. A quoi est due cette situation ?

    Voilà une grosse question que vous me posez là. D’abord, les salles de cinéma sont fermées et le peu de salles qui existent est mal géré, et l’est de manière administrative. Je le dis très simplement : la culture ne peut pas être gérée administrativement et on ne peut pas gérer une salle de cinéma comme on peut gérer une administration avec des fonctionnaires.

    On est dans l’art, on est dans le cinéma, on est dans la culture. On doit continuer la gestion du secteur auquel on s’adresse. Il ne s’agit pas ici d’une administration qui ouvre à 8 heures et qui ferme à 17 heures. D’ailleurs, c’est à 17 heures que les gens sortent de leur lieu de travail et qu’ils décident d’aller voir un film pour la soirée.

    Avec un faible nombre de salles et très peu de projets de réhabilitation ou de construction de salles neuves, la distribution de films en Algérie n’est-elle pas, justement confrontée à un sérieux obstacle ?

    C’est justement l’obstacle majeur parce que la destination d’un film, c’est la salle de cinéma. Et quand il n’y a pas de salle de cinéma, le film peine à arriver au public. Bien sûr, il y a un programme de restauration des salles de cinéma et je trouve cela formidable, parce que le public a le droit de regarder un film dans des conditions correctes, c’est-à-dire sur un grand écran, avec un son idéal, assis dans un fauteuil confortable. Aujourd’hui, si on rassemble les moyens financiers pour restaurer les salles, mais le film n’est pas disponible, ça ne sert strictement à rien de les remettre à neuf. D’autant qu’il faut être à jour quant aux sorties internationales de films.

    Aujourd’hui, il y a une multiplicité de réseaux pour le cinéma : les gens sont connectés à internet, disposent d’antennes paraboliques pour capter les chaînes européennes, américaines ou arabes, et aujourd’hui, tout le monde est au courant que tel film va sortir dans deux ou trois mois. Même le début et la fin du tournage d’un film est l’objet d’une information. Le public algérien est consommateur d’images,  apprécie le cinéma et a envie de voir des films. Et il sait par avance que tel film va sortir à telle date et si ce film n’est pas disponible il va essayer, par tous les moyens, de le voir soit en le piratant via internet, soit en achetant des DVD piratés, parce que le piratage est florissant ici. Et si le film est enfin distribué dans les normes 6 mois plus tard, pourquoi voulez-vous qu’il aille le voir dans une salle de cinéma ?

    Il faut, pour que le film soit disponible de suite en salle, obtenir immédiatement le visa d’exploitation de telle manière à ce que le film soit vu au moment-même de sa sortie internationale. D’ailleurs, la preuve en a été faite avec des films comme Harry Potter, qui ont été programmés avant leur sortie américaine. Le problème n’est donc pas au secteur, mais plutôt à la gestion et à la configuration qu’on veut donner aux salles de cinéma.

    La ministre de la Culture a évoqué, un jour, l’idée que des superproductions internationales seraient tournées en Algérie. Est-ce réalisable, concrètement, lorsque l’on sait que certains films algériens, qui mettent pourtant en scène l’Algérie, sont encore tournés à l’étranger ?

    Ça me fait un peu sourire d’entendre de tels propos. A ma connaissance, je ne connais pas beaucoup de films à budget international tournés en Algérie. Et il est malheureux, effectivement, de constater que beaucoup de cinéastes qui sont censés réaliser des films ayant trait à l’Algérie préfèrent les tourner en Tunisie ou au Maroc.

    Pire encore, il y a beaucoup de cinéastes algériens dont le propos est l’Algérie qui vont tourner au Maroc ou en Tunisie tout simplement parce que la situation n’est pas du tout facile pour qu’on tourne allègrement dans notre pays et je le regrette vivement. Et quant à voir des cinéastes désirant tourner en Algérie, je n’en ai trouvé aucune trace à ma connaissance, du moins pour le moment. Sauf si, effectivement, on leur offre un joli cachet, peut-être que le tournage peut se faire.

    On peut dire que le cinéma, c’est toute votre vie. Vous êtes même un « chercheur de films », puisque vous distribuez aussi bien des films nationaux qu’étrangers. Comment se passe l’acquisition des droits de distribution ? Quels genres de films avez-vous distribué ?

    Non seulement je distribue des films de cinéma, mais en même temps je produis puisque que je vais produire, après le Ramadan et dans votre région [Annaba], un film avec un réalisateur qui réside aux Pays-Bas et j’espère qu’une fois tourné, il pourra être présenté dans une salle de cinéma.

    J’ai produit et coproduit plusieurs films, dont un qui a été diffusé il y a deux semaines de cela sur France 5. J’ai coproduit La Chine est encore loin de Malek Bensmail, film que j’avais présenté à l’Institut Culturel Français. J’ai d’autres projets de productions et de coproductions à l’avenir et je vous tiendrai davantage au courant. Je compte revenir sur Annaba pour une journée pendant le Ramadan et après le mois sacré pour des repérages.

    Que faire pour redonner envie aux Algériens d’aller au cinéma ?

    D’abord, il faut qu’il y ait des salles de cinéma et qu’elles soient confortables avec un son et une image agréables et surtout qu’il y ait des films intéressants. Sinon, comment voulez-vous voir un film qui est sorti il y a de cela trois, six mois ou une année ? On va au cinéma pour voir un film qui vient de sortir.

    Et d’autre part, il faut que les salles de cinéma fonctionnent normalement selon les règles de commercialité. Il faut que le contrôleur ait en envie que vous soyez assis confortablement, que l’opérateur-projectionniste s’assure d’une belle projection pour que vous reveniez plus tard. S’il n’y a pas ces éléments-là, autant rester chez vous à regarder un film avec un DVD pirate. Je le dis et je le redis, il faut des salles de cinéma dignes de ce nom en Algérie.

     

    Source : Le Provincial

    « Samia Meziane, comédienne algérienneBelkacem Hadjadj, cinéaste algérien »
    Partager via Gmail

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :


Your Website Title
How to Share With Just Friends

How to share with just friends.