• Un film de Sanifez Bousbia :El Gusto

    El Gusto

    El Gusto

    Un film de Sanifez Bousbia


    Un documentaire que « c'était pas la peine ».


    Article de Emmanuel Hoblingre 1 étoile


    Synthèse de traditions musicales berbère, andalouse et religieuse, le chaâbi est né au milieu des années 1920, dans la casbah d'Alger. Influent et populaire, ce courant musical disparaît avec la guerre d'indépendance : les cafés ferment, les musiciens se dispersent, certains contraints de quitter l'Algérie pour la métropole. Cinquante ans après, la réalisatrice Safinez Bousbia tombe sous le charme de cette musique et de son histoire : elle décide d'organiser les retrouvailles d'anciens camarades. Ensemble, ils forment l'orchestre El Gusto.

    Avoir un bon sujet ne suffit pas ; encore faut-il savoir le traiter. Un groupe de musiciens qui se recompose après des décennies ? Wim Wenders (Buena Vista social Club, évidemment) mais aussi Miguel Kohan (le très beau Café de los maestros) l'ont traité avec succès à l'écran. Chacun à leur manière, ces réalisateurs ont su capter une époque révolue et les outrages du temps. Une douce nostalgie nous emportait : nous suivions des destins incroyables, tendions l'oreille, curieux de chaque anecdote et de la moindre confidence. Naturellement, la musique ne s'en trouvait que bonifiée. Hélas, dans El Gusto, ce n'est ni le chaâbi ni ses interprètes qui sont à l'honneur mais la réalisatrice, qui squatte le champ et étale sa vie plutôt que celle de ces musiciens. C'est que le film repose sur un postulat de départ bancal, le choix d'un angle peu approprié : il s'agit de raconter une histoire à travers l'expérience personnelle de cette jeune réalisatrice. Une agaçante voix-off raconte ainsi la genèse du projet et les difficultés rencontrées pour finalement aboutir aux retrouvailles. Celles-ci n'interviennent que dans le dernier quart du film, tant et si bien que le documentaire s'achève donc là où il aurait dû commencer.

    A ce fondamental problème de construction du récit vient s'ajouter la faiblesse généralisée du traitement. La caméra n'est jamais là où il le faudrait, les séquences musicales sont trop rares et filmées sans génie ; quant aux récurrentes vues aériennes de la casbah, elles sont un non-sens au milieu de ce film intimiste. Il y a enfin cette sensation désagréable que tout cela est un rien scénarisé, tourné et retourné. Pour un documentaire, cette impression tenace de construction est gênante. 
     
    Au final, le film ne trouve pas sa voie, suivant beaucoup trop de personnages et de pistes, hésitant entre une chronique mélancolique d'Alger, un cours du soir accéléré sur la guerre l'Algérie et un reportage touristique sur la casbah. On se perd un peu et on s'ennuie ferme. La musique dans tout ça ? On ne l'entend guère, noyée au milieu d' interminables interviews de vieillards qui radotent que le bon temps est révolu (franchement vain). Et lorsque enfin les musiciens se retrouvent, ce qui devait arriver... n'arrive pas. Ils ne se disent rien ou presque, se toisent autour d'une bière, sans plus. A se demander s'ils se sont déjà croisés dans une autre vie ! Là encore, on se dit que la réalisatrice, plutôt que d'occuper le cadre, aurait mieux fait de rester derrière la caméra, à l'affût de propos intéressants et d'images percutantes. 

    En voulant faire connaître et partager sa passion pour le chaâbi,Safinez Bousbia rend au final un bien mauvais service à la musique qu'elle prétendait promouvoir. Trouvé dans un bac, adossé à un CD d'El Gusto, un DVD bonus incluant ce documentaire mal fichu, ce film serait pris pour ce qu'il est : une laborieuse tentative d'expliciter les racines de la musique chaâbi, un film promotionnel pour vendre un groupe de papis. Pas de quoi s'énerver. En revanche, à une heure où manquent les écrans de cinéma pour faire connaître de jeunes et talentueux réalisateurs, la sortie en salles d'un tel objet ne peut qu'agacer. D'autant que la réalisatrice, également productrice du groupe, conclut son film en rappelant qu'une tournée mondiale est en cours... Ces papis ont beau avoir l'air sympathiques et leur musique pas désagréable, ce documentaire l'est beaucoup moins. Au sortir de la salle, le sentiment franchement désagréable d'avoir payé sa place pour visionner une mauvaise pub.

    Affiche du Film

    Affiche El Gusto

    .1 étoile

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