• Interview de Maads Mikkelsen pour le film Michael Koolhaas.

    Interview de Maads Mikkelsen pour le film Michael Koolhaas. Convertir en PDF Version imprimable Suggérer par mail
    Écrit par Christophe Dordain   
    16-08-2013

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    "Michael Koolhaas". Un film d'Arnaud Des Pallières avec Mads Mikkelsen, Delphine Chuillot, Mélusine Mayance.

    Sortie le 14 août 2013.

    Crédits photographiques : Les Films du Losange.

    INTERVIEW DE MAADS MIKKELSEN POUR

     

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    Qu'est-ce qui vous a attiré dans ce projet ?

    J’ai senti qu’il y avait laÌ€ quelque chose de radical, d’exigeant. Pas seulement dans le personnage mais aussi dans le scénario. Quelque chose qu’on ne voit pas tous les jours, dans notre métier. Une façon de raconter qui se met entieÌ€rement au service d’une idée. D’un personnage. Lors de ma premieÌ€re rencontre aÌ€ Copenhague avec Arnaud des PallieÌ€res, je ne savais rien de lui. Ni qui il était, ni ce qu’il avait fait. Deux heures plus tard, je ne savais pas plus qui il était mais j’étais curieux de le savoir et de travailler avec lui. Nous nous sommes rencontrés dans un café. La plus grande partie de notre conversation s’est faite en anglais, et la plus grande partie avec Serge Lalou, son producteur, comme interpreÌ€te. Arnaud a ce rapport bizarre et respectueux aux langues qui fait que, même si son anglais est bien au-dessus de la moyenne, il ne souhaite pas trop parler anglais. (rires) Il était pourtant treÌ€s présent lors de la conversation, même s’il n’est pas souvent intervenu directement. Ce qui rendait ses interventions (en français ou en anglais) d’autant plus intenses, quand enfin il disait quelque chose. Il était évident qu’il avait une mission aÌ€ remplir avec ce film.

     

    Qui est Michael Kohlhaas ?

    Kohlhaas est un personnage unique. Il n’est pas comme vous et moi. Kohlhaas demande la chose la plus simple au monde (la justice, l’égalité des droits entre les hommes) et cela déclenche l’extrême autour de lui. Kohlhaas est un homme dont les idéaux sont bien plus grands que lui-même. Bien plus grands que sa propre vie.

     

    Comment vous êtes-vous préparé pour ce rôle ?

    En travaillant sur le scénario, d’abord. Mais la préparation la plus importante est toujours celle qu’on fait avec le metteur en sceÌ€ne. Je lui pose un maximum de questions, j’essaie d’obtenir un maximum de réponses, en acceptant de ne pas les avoir toutes avant de me lancer. J’essaie de me rapprocher des pensées et des sentiments du metteur en sceÌ€ne, de sa vision, et pas seulement du rôle que je vais jouer. Lors de ma premieÌ€re rencontre avec Arnaud, j’étais venu avec des idées pour le personnage, des suggestions pour le scenario. Toutes treÌ€s raisonnables d’ailleurs. Arnaud les a balayées avec une salve de retentissants « Non. Non. Non. ». (rires) Je n’étais pas vraiment habitué aÌ€ ça... (rires) Mais ça ne m’a pas gêné, parce qu’il s’exprimait avec passion et enthousiasme. Et qu’il m’a tout de suite expliqué pourquoi cette histoire devait être racontée comme il avait prévu de le faire, et pas autrement. Pendant la préparation qui a suivie, Arnaud et moi avons beaucoup parlé. On a (presque) tout abordé. Le tournage fut donc beaucoup moins bavard. Une collaboration avec de moins en moins de mots, chaque jour plus intuitive. Tout ayant été déjaÌ€ longuement discuté.

     

    Comment avez-vous travaillé sur le tournage avec Arnaud des Pallières ?

    Avant la premieÌ€re prise, il ne disait rien. Il me laissait faire une proposition. Les indications venaient apreÌ€s. Ça pouvait être soit rien, soit beaucoup. Certaines sceÌ€nes étaient dans la boîte en trois prises, d’autres demandaient une journée. Nous avons par exemple passé une journée entieÌ€re aÌ€ faire la sceÌ€ne ouÌ€ Kohlhaas tente désespérément de sauver sa femme agonisante. Une sceÌ€ne treÌ€s dure physiquement et émotionnellement pour les deux acteurs, en un plan séquence. Et si nous la refaisions autant, ce n’était pas parce que quelque chose n’allait pas. Mais parce qu’au contraire, il y avait tant de possibilités qui semblaient justes, et qu’il était difficile de dire laquelle était la bonne. Dans le déroulement de la sceÌ€ne, les acteurs avaient une grande liberté. Et la fatigue en fin de journée était une bonne fatigue. La façon de travailler d’Arnaud ne m’a pas particulieÌ€rement surpris. On se connaissait maintenant. Chacun savait ce qu’il fallait faire pour que l’autre se sente libre. Le travail variait bien sur en fonction de chaque sceÌ€ne aÌ€ tourner mais il était toujours empreint d’une certaine forme de pureté et d’intransigeance.

     

    Quelle est la scène dont vous avez le souvenir le plus fort ?

    Celle dont je viens de parler : Kohlhaas et sa femme aÌ€ l’agonie. Et aussi ce moment incroyable ouÌ€ je mets un poulain au monde. On ne pouvait préparer la naissance du poulain que jusqu’aÌ€ un certain point. Le faire en vrai, le faire seul, tout en jouant le role d’un homme qui en a l’habitude, dont c’est le quotidien, c’est autre chose. Je n’avais droit qu’aÌ€ une seule prise. Sanabra, le dresseur de chevaux, l’homme qui nous a appris aÌ€ monter correctement sur ce film, se tenait aÌ€ coté de moi, hors champ. Il me soufflait ce que je devais faire, et puis aÌ€ un moment, tout aÌ€ coup, le poulain est venu. Je le tenais dans mes bras. Un moment absolument magique. Difficile de ne pas être submergé par l’émotion... mais c’était la vie quotidienne de Kohlhaas et j’ai dû refouler cette émotion.

     

    En quoi cette expérience de tournage a-t-elle été particulière, pour vous ?

    Les chevaux occupaient la majeure partie de la vie de Kohlhaas, par conséquent pour moi aussi. Pendant la préparation, j’habitais chez Sanabra et sa famille. Chez eux, j’apprenais aÌ€ vivre avec les chevaux, et aÌ€ tout faire pour de vrai. J’étais entouré de chevaux magnifiques, dangereux et fous mais qui se sont comportés jour apreÌ€s jour de mieux en mieux. Je suis devenu plus habile, plus calme. Arnaud était parmi nous. Il nous parlait du film. J’étais entouré d’acteurs qui, comme moi, venaient travailler avec Arnaud et les chevaux. Sanabra m’a appris le français alternatif, le soir, autour d’un verre de vin. C’était une période particulieÌ€rement exigeante pour moi, en terme de travail mais qui évoque aussi les plus heureux souvenirs.

     

    Qu’est-ce qui a été le plus difficile sur ce film ?

    Le plus difficile ? La langue ! (rires) En tant qu’acteur, me sentir vivant dans une autre langue est le plus difficile et le plus important. Pas seulement me faire comprendre lorsque je prononce mes dialogues. Vivre et sentir dans la langue du film. Bien sûr, ça n’est pas suffisant. Il faut AUSSI que mon texte soit compréhensible. Alors l’équilibre entre me sentir libre de jouer sans être obsédé par ma diction et être compréhensible lorsque je disais mon texte n’a pas toujours été facile aÌ€ trouver. Arnaud et moi avons cherché et inventé une façon de travailler. Et surtout, nous n’avons jamais baissé les bras. Je crois... (rires)

     

    Que pensez-vous que l’histoire de Kohlhaas peut nous apprendre sur nous-mêmes ?

    Je ne crois pas qu’un film doive forcément nous apprendre quelque chose. Tant mieux si c’est le cas mais ce n’est pas ma premieÌ€re préoccupation. Sinon je serais politicien ou pédagogue, pas acteur. Bien sûr, le film raconte une histoire. Il montre comment l’obsession de la justice peut produire l’injustice et l’aveuglement. Il montre un homme qui perd tout, aÌ€ cause d’un idéal. Mais pour l’essentiel, et j’espeÌ€re que ce sera le cas pour beaucoup de gens, l’histoire de Michael Kohlhaas est un voyage philosophique dans le cœur de l’homme.
     

     
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