• Lubna Azabal. Actrice :

    Lubna Azabal. Actrice :

    «J’ai adoré tourner à Alger, c’était émouvant !»

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    le 26.01.14 | 10h00 Réagissez

     
	L’actrice belge, Lubna Azabal, ( Exils, Viva L’Aldjérie, Goodbye Morocco) campe le rôle charismatique de Kheira dans le film La Marche, de  Nadir Ben Yadir.

    | © D. R.
    L’actrice belge, Lubna Azabal, ( Exils, Viva...

     

    -La Marche est un film historique pour vous...

    C’est un film essentiel. Il y a 30 ans, on tuait les Arabes et les auteurs de ces crimes écopaient au maximum de 6 mois de prison. On était dans un contexte où il y a eu a peu près 200 morts en l’espace d’un an et demi, deux ans. Donc, effectivement, il y a quelque chose de vital et d’urgent  pour ces jeunes, avec une innocence complètement folle, qui ont fait ce pari complètement fou en se disant : «On va marcher comme Ghandi !» Et puis, ils ont réussi à fédérer 100 000 personnes au final. Ce film est une piqûre de rappel qui est plus importante aujourd’hui, avec ce qui se passe en France. On insulte des ministres parce qu’ils sont noirs. C’est devenu ordinaire, banal et normal…

    -Un film actuel…

    C’est-à-dire qu’il répond avec une coïncidence assez stupéfiante et malheureuse d’ailleurs. Vous voyez, on insulte des ministres parce qu’ils sont noirs. Il y a quelque chose qui est devenu totalement décomplexé et totalement inacceptable. Parce qu’il y a une parole qui s’est libérée au niveau politique. Maintenant, on n’a pas peur de dire que ce sont les émigrés qui nous font c... ! Alors qu’il y a 30 ans, on avait cette pudeur politique.

    -C’est devenu  ordinaire…    

    C’est devenu complètement ordinaire, banal, normal ! Quand les politiques s’y mettent, comment voulez-vous que les citoyens réagissent ? Et forcément, c’est une porte qui s’ouvre à des propos. Il y a des actes totalement inadmissibles qu’on appelle du racisme, quoi ! Et cela, c’est quelque chose qui contamine toute l’Europe en ce moment. Ces alliances ! Tout cela est extrêmement vicieux et dangereux.  

    -Un nationalisme…

    Oui, voilà tout à fait ! Il y a un nationalisme qui est probablement dû à une crise économique, forcément. Quand le portefeuille va mal, c’est la faute au voisin. Et s’il a une couleur de peau plus foncée… Alors, voilà ! D’où l’importance de ce film, effectivement, maintenant. Et qui est un message d’amour et de tolérance : «On vous aime. On est Français ! Acceptez-nous ! On aime la France ! Aimez-nous !»

    -Cette fameuse marche était-elle l’ultime et unique moyen d’expression ?

    C’était soit marcher ou se venger. Mon personnage dans le film, par exemple, Kheira, entre dans une marche non violente. Mais elle est très violente à l’intérieur. Petit à petit, elle apprend à canaliser, à apprivoiser cette violence. Mais c’était soit marcher, soit mourir. Il n’y avait pas beaucoup de choix.

    -Etes-vous habitée par le personnage de Kheira  ?

    A chaque fois que j’accepte un rôle, je deviens habitée par le personnage. Oui, j’ai vécu avec pendant trois mois, jour et nuit. C’est un personnage assez loin de ce que je suis.

    -Très loin…

    Oui, oui !  Trop loin ! (rire). Je ne suis pas dans cette colère-là, en tout cas. Je me suis beaucoup inspirée du mouvement Black Panthers pour faire le film. J’ai énormément vu de documentaires avec Angela Davis. Je me suis alimentée de cela. Je suis allée chercher cette inspiration pour pouvoir amener cette violence-là. Parce que c’est aussi un mouvement qui est né dans la violence, la douleur… Kheira, quand elle arrive dans la marche, est plutôt dans cette mouvance-là. Elle n’est pas dans le côté fleur bleue.

    -Un rôle utile et pas «futile»…

    Je suis très heureuse et très fière de m’être greffée dans cette histoire et d’en faire partie. Et de mettre mon métier au service de ce genre de film (La Marche). Pouvoir allier le cinéma à l’utile. Parce que le cinéma, de temps en temps, est un acte politique. Je pense, en tant qu’artiste, qu’on se doit d’avoir des actes engagés, politiques. Malheureusement, moi, je voulais être reporter de guerre, je n’ai pas eu l’opportunité de prendre une caméra et de faire cela. Donc, j’essaie de le faire dans le cinéma.

    -Vous avez tourné plusieurs films sous la direction de Nadir Moknèche. De bons souvenirs ?

    Oui, le dernier film avec Nadir Moknèche c’était Goodbye Morocco. J’ai fait aussi Viva L’Aldjérie. Ah, oui ! c’est toujours un bon souvenir. J’adore travailler avec Nadir Moknèche. Déjà, c’est un très grand ami. C’est quelqu’un avec qui je m’entends très bien. Et on se comprend assez vite. J’adore son univers. Et puis, c’est quelqu’un qui sublime les femmes. Il y a très peu de beaux rôles féminins au cinéma. C’est un des rares réalisateurs algériens, en tout cas du Maghreb, qui arrive à faire de beaux portraits de femmes. Et à faire passer des messages qui sont importants. C’est vrai qu’on est dans le monde arabe, Nadir Moknèche renverse la donne de la condition féminine. Et il en fait des femmes fortes, belles, rebelles… Des femmes qui existent, quoi ! Que cela soit à travers un homme, je trouve ça très bien. C’est l’un des meilleurs réalisateurs que vous avez. Il est d’une finesse, d’une  intelligence ! Sincèrement, il faut le préserver ! C’est un grand cinéaste !

    -Viva l’Aldjérie à Alger était une belle aventure...

    Je suis restée deux mois à Alger pour le tournage de Viva L’Aldjérie. J’ai adoré ! C’était super ! Et je suis arrivée à Alger qui commençait tout doucement à guérir de dix années de terrorisme quand même. Les blessures étaient très ouvertes. C’était très émouvant ! Je pense qu’on faisait partie de la première équipe européenne, française à oser revenir et venir là. Et c’était très bien de le faire à ce moment-là. Le cinéma, c’est aussi cela. Insuffler de la vie, ouvrir des fenêtres, faire entrer l’air, panser les blessures… Cela a été terrible quand même.

    -Tourner dans des blockbusters, est-ce une opportunité ?

    Cela ne m’intéresse pas tant que cela. Je suis heureuse d’être dans un projet qui me parle. Tourner dans un blockbuster, c’est génial, si on a envie de s’acheter un appartement à New York (USA). Comme ce n’est pas dans mes priorités, si le scénario me plaît je prend le rôle. Qu’il soit un blockbuster ou un film d’auteur. Après, si ce n’est pas bon, je ne le fais pas.

    -Et tourner sous la direction de Ridley Scott dans Body Lies…

    Eh bien, c’est une expérience assez extraordinaire, très belle forcément ! On est dans un univers où il y a 10 caméras, je ne sais combien de chefs opérateurs, une équipe «monstre», des décors gigantesque… Leonardo DiCaprio qui vous dit bonjour tous les matins. Mais je ne suis pas en demande de cela.

    K. Smail
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