Jeunes cinéastes, vous rêvez de tourner votre premier film mais
Jeunes cinéastes, vous rêvez de tourner votre premier film mais manquez de moyens et d’expérience en matière de réalisation? Cinéma Guérillaest fait pour vous! Jérôme Genevray, réalisateur, auteur et producteur, a rédigé un petit précis illustré d’anecdotes de personnalités du septième art (Albert Dupontel, Rémi Bezançot, Lionel Astier…) à destination des cinéastes en devenir.
De l’écriture d’un film à la définition du budget en passant par la préparation du tournage, la production ou la distribution, ce guide retrace toutes les étapes indispensables à la réalisation indépendante avec clarté et intelligence. Muni d’un téléphone portable ou d’un appareil photo – façon Valérie Donzelli pour La Guerre est déclarée -, vous apprendrez que « faire un bon film n’est plus une question de moyens, mais de méthodes ».
Nous avons voulu en savoir d’avantage sur ce beau projet et avons échangé, à cette occasion, avec l’auteur de Cinéma Guérilla, mode d’emploi :
Des films et des mots : Comment vous est venue l’idée d’écrire ce guide à destination des cinéastes amateurs ?
Jérôme Genevray : J’ai commencé à réaliser des films avec des amis quand j’étais au lycée. On était passionné. On tâtonnais, aussi bien d’un point de vue technique qu’en terme de méthode pour faire un film. A cette époque, j’aurais bien aimé avoir un guide qui nous explique les différentes étapes de la construction d’un film, avec des conseils de pro. Depuis, j’ai réalisé et produit plusieurs courts et publicités et je me suis dit mon expérience et celles d’autres professionnels pourraient aider les jeunes cinéastes. D’autre part, il y avait plusieurs guide de ce type aux Etats-Unis et encore aucun en France.
DFDM. : Comment vous y êtes-vous pris (pourquoi avoir sollicité tel témoignage plutôt que tel autre? Les personnes interviewées ont-elles unanimement accepté d’être citées dans le livre)?
J.G : Je ne voulais pas faire un livre composé de règles et de principes, mais plutôt de conseils et de retours d’expériences. Le livre qu’on peut garder dans la poche et sortir au moment opportun pendant la phase de création d’un film. Les conseils et astuces de différents professionnels du cinéma permettent d’inspirer et de guider le jeune cinéaste. Le choix des personnes interviewées s’est fait sur des bases totalement subjectives : j’ai contacté des gens dont j’aimais le travail, et qui me semblait être en adéquation avec la philosophie du cinéma guérilla. Quelques uns ont refusés, mais c’est globalement avec beaucoup d’enthousiasme qu’ils ont accepté !
DFDM. : Pourquoi ce titre « Cinéma guérilla »?
J.G : Avec l’avènement du numérique, symbolisé par ces fantastiques appareils photo reflex HD, nous vivons une nouvelle « nouvelle vague » du cinéma. Le « Cinéma Guérilla » se réfère à l’appellation anglaise de « Guerilla Filmmaking » qui caractérise les productions avec un petit (voire pas) de budget et une équipe très réduite de gens acharnés. Les tournages se font souvent sans autorisation ou permission. Il s’agit de films indépendants, fait en marge du système, et qui part leur sincérité et engagement artistique peuvent connaître un succès imprévu et étonnant, et bousculer les règles établies. D’où le côté guérilla. Une autre appellation (encore anglaise) : le DIY (Do It Yourself). Quelques films guérilla : Rubber de Quentin Dupieux, Donoma de Djinn Carrénard, Monsters de Gareth Edwards, etc.
DFDM : Vous dites qu’il est possible de réaliser un film avec un téléphone portable. Pourtant, vous reconnaissez que la qualité des vidéos est souvent médiocre. Comment palier aux problèmes engendrés par ce type de matériel (au niveau du son, de la lumière, de l’image…)?
J.G : Ce qui compte au final pour le spectateur, c’est la sincérité et l’originalité du propos. La qualité technique intervient toujours en second. Par exemple, j’ai réalisé Rainy Girl au téléphone portable (à l’époque un N95 à l’image très médiocre, même pas en HD, rendez-vous compte !) et qui a obtenu plusieurs premiers prix, a été diffusé sur Arte et au centre culturel de Beaubourg à Paris.
Pour palier à la médiocre qualité technique, il existe des micros directionnels que l’on peut connecter sur le téléphone portable (mais le son sera toujours très moyen), et un bon coup d’étalonnage sur votre ordinateur permet de donner un style intéressant. Mais le mieux est d’assumer le style du matériel utilisé et qu’il serve le propos.
La qualité « typique » des vidéos faites au téléphone portable a un style (que l’on aime ou non) qui sera certainement vintage d’ici quelques années, comme la médiocre qualité du film Super 8 ou du Polaroid du siècle dernier…
DFDM. : Outre un appareil photo numérique ou un téléphone portable haut de gamme, dans quel autre type de matériel conseilleriez-vous d’investir?
J.G : Il n’y a pas photo (hahaha) : si vous souhaitez investir, optez pour un appareil photo (tous enregistrent en HD). Avec un peu d’argent, de l’ordre de 500 €, vous aurez un très bon reflex (DSLR, en anglais) : les vidéos seront d’une qualité incroyable. On peut même tourner en lumière naturelle et obtenir un très bon résultat. En poussant un peu plus l’investissement, prenez un micro directionnel (micro zoom) connecté à la caméra pour enregistrer correctement les dialogues.
DFDM. : Selon vous, quel est le coût moyen d’un film tourné avec un appareil photo numérique ou un téléphone portable?
J.G : Cela dépend de pleins de paramètres : durée du film, sujet, nombre de jour de tournage, nombre de lieux différents, etc. Mais si chacun met un peu la main à la pâte (acteurs, techniciens) et que l’on considère que l’investissement de l’appareil photo n’est pas comptabilisé, le coût peut être proche de zéro. Au final, ce qui revient le plus cher dans un film en mode Guérilla, c’est la régie et les repas : n’oubliez pas que les gens travaillent gratuitement pour votre projet et que cela doit se faire dans de bonnes conditions.
Cinéma guérilla, mode d’emploi, de Jérôme Genevray, Éd. Dunod. Parution le 4 avril 2012.