Le long discours de la ministre de la Culture emprunt de didactisme et de pédagogie se voulait clair et précis pour éviter tout amalgame épistémologique s’agissant du programme culturel global que son ministère a en charge depuis près d’une décade, déjà avec l’issue de chaque événement culturel d’envergure nationale et internationale des obligations de résultat caractérisées par une volonté tenace de sortir ce secteur névralgique de son long marasme ; obligations au cours desquelles des projets grandioses de réalisation en termes d’infrastructures culturelles, de festivals et autre Salons du livre auront concrètement porté leur fruit.

La ministre de la Culture est intervenue hier pour évoquer la politique culturelle de son secteur devant une nombreuse assistance en évoquant, d’une manière réaliste et parfois passionnée, un sujet qui lui tient à cœur et qui se distingue souvent par une opacité en termes de définition. Son  long discours emprunt de didactisme et de pédagogie se voulait clair et précis pour éviter tout amalgame épistémologique s’agissant du programme culturel global que son ministère a en charge depuis près d’une décade déjà avec l’issue de chaque événement culturel d’envergure nationale et internationale des obligations de résultat caractérisées par une volonté tenace de sortir ce secteur névralgique de son long marasme, obligations au cours desquelles des projets grandioses de réalisation en termes d’infrastructures culturelles, de festivals et autre Salons du livre auront concrètement porté leur fruit.
Avant toute chose, la ministre a tenu à exposer ce qu’est une politique culturelle de son point de vue et de celui de l’Unesco, une organisation intergouvernementale dans laquelle siège l’Algérie : «Une politique culturelle, c’est d’abord des objectifs clairs à atteindre à l’issue desquels on met en place un ensemble d’encadrements juridiques, lois décrets, arrêtés avec la création d’un ensemble d’établissements et d’institutions culturelles et un encadrement humain qui nécessite des budgets», dit-elle. Le ministère de la Culture a toujours eu des objectifs en terme de livres, de cinémas et d’arts vivants et de patrimoine, parce que comparativement aux autres ministères, il fait partie des ministères transversaux  très complexes par leur nature. La politique culturelle est un tout qui se subdivise à son tour en politiques comme celle du livre.
 
La politique culturelle du livre
Celle-ci obéit à un objectif majeur qui est celui d’encourager et de soutenir toute la chaîne du livre pour arriver à terme à la mise en place d’une véritable industrie du livre. «Développer toute la chaîne du livre avec pour objectif primordial de l’État algérien de permettre au livre d’atteindre le citoyen parce que dans cette politique, il y a deux éléments fondamentaux comme le droit du citoyen d’accéder à la culture, à savoir le droit d’accès à un smig culturel qui est un droit constitutionnel. Cela étant pris au sens global, car le domaine de la culture concerne aussi celui de l’éducation et des collectivités locales», a-t-elle précisé.
En annonçant que l’une des priorités du gouvernement algérien est de faire arriver le livre gratuitement dans tous les coins du pays en développant le service public à travers les bibliothèques de lecture publiques avec le gigantesque programme entamé en 2006 d’une bibliothèque au moins dans chaque commune. «Un État qui finance sur le budget public la construction de plus de 1.600 bibliothèques en leur conférant un statut  – dont le ministère de la Culture en a réceptionné 214 finies et le ministère de l’Intérieur  doit en réaliser 1200 -  en les équipant et en les encadrant humainement, suppose qu’il a un projet de société avec un programme culturel civilisationnel. En sus de ce réseau, il y a des bibliobus dans chaque wilaya.» Dans la chaîne du livre, il y a le domaine de l’édition qui passe bien sûr  par une opération culturelle, mais aussi économique. On peut s’enorgueillir en affirmant qu’en 2002 il y avait seulement 40 maisons d’édition, alors qu’au jour d’aujourd’hui, on en compte plus de 320, ce qui implique plus d’entreprises économiques qui génèrent de l’emploi.
La politique de soutien au livre n’a pu se concrétiser dans les faits que grâce à un fonds qui l’alimente  par l’intermédiaire du budget de l’État et les taxes qui font partie de la loi de finances promulguée en accord avec le Parlement ; ce fond s’appelle «le Fonds de développement des arts et des lettres» ou FDAL – lequel existait depuis 1967 et dont le ministère a révisé les textes d’encadrement, car la part qui était réservée au livre était très minime – qui est soutenu par la politique de l’État-client qui les verse dans les bibliothèques publiques.
Cette politique qui a vu le jour en 2007, à l’occasion d’«Alger Capitale de la culture arabe», a permis d’acheter 3.500 titres et l’équivalent de 3 millions 200.000 exemplaires traités en Algérie. À ce sujet, la ministre a déclaré qu’aucun fonds ne pouvait être mouvementé, s’il n’était encadré par des textes de loi, sachant qu’en dehors des livres scientifiques et techniques, ce fonds soutient les maisons d’édition privées puis que son objectif est de défendre l’entreprise algérienne.
Mais, dans la chaîne de l’édition, il y a cependant un anneau qui est rompu ; c’est celui de la distribution, car elle ne peut se faire sans l’existence de lieux appropriés, à savoir les librairies. Or, ce secteur commercial doit être régulé par des lois dont les discussions sont actuellement en cours  au niveau du secrétariat général du gouvernement intitulé «Avant-projet de loi relative aux activités du livre» pour encourager le privé algérien à ouvrir des librairies sur le territoire national, de trouver des mécanismes pour aider les libraires et cela, annonce la ministre, en instaurant le prix unique du livre, car il est anormal que le prix du livre varie d’une ville à une autre. Le soutien à la distribution passe aussi par le financement des ateliers d’écriture en amont, aux créateurs, aux prix littéraires, aux festivals et aux Salons dont l’objectif est la promotion du livre.
Pour la ministre, il obéit au même schéma que celui préconisé  pour la politique du livre, sauf que pour le cinéma algérien. Il a fallu le sortir de la mort certaine dans laquelle il avait plongé dans les années 1990 avec le terrorisme, mais aussi le changement de régime politique et le contexte économique mondial puisqu’il fallait tenir compte des injonctions du FMI.

Le soutien au cinéma
La libéralisation totale sans transition a eu pour effet de stopper la production cinématographique et la dissolution des structures afférentes. Le FDATIC, créé en 1967, le fut par une ordonnance et non pas une loi de finances, et le ministère de la Culture a dû batailler fort en 2010 pour autoriser les producteurs et réalisateurs à investir dans le cinéma à travers une loi de finances qui leur facilite toutes les procédures administratives, car le premier objectif était de relancer la production d’images par les Algériens eux-mêmes. Ainsi, le fond a validé en 2012, sur 52 projets de production, 25, que la commission a approuvés et en voie de réalisation et dont le fonctionnement et les procédures ressemblent à ceux du cinéma français.
La ministre a en outre, dans le même sens, abordé le problème de distribution dans le cinéma et les marchés puisque bons nombre de salles sont fermées et que les Algériens sont privés de la projection de films produits par des Algériens, ainsi que le ministère voudrait récupérer pour les mettre à la disposition du public en les restaurant et réhabilitant  aux normes internationales, et cela en concertation avec les communes. «Notre but est de récupérer les portefeuilles des salles à travers des Epic et les faire gérer par des entreprises qui, à partir de juin 2013, seront numérisées en employant des exploitant professionnels», annonce la ministre.
La préservation et la prise en charge de ce secteur doit prendre en charge le patrimoine culturel en faisant un inventaire et un classement des sites. Toutes ces opérations nécessitent un budget, car le patrimoine exige des fouilles fortuites  et l’acquisition de biens pour les musées.                               
Lynda Graba

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Au sujet de la campagne de dénigrement dont elle a été la cible :
“Nous n’avons pas de leçons à recevoir des descendants des pharaons”
C’est avec un esprit cartésien propre aux professeurs de mathématiques, que la ministre de la Culture  a tenu   à répondre à ses détracteurs et  à ceux qui ont  mené une  campagne de dénigrement sans précédent  à l’encontre de sa personne, mais,  à travers elle,  visent l’Algérie. Hier, au Forum culturel d’El Moudjahid, qui a reçu Mme Khalida Toumi, le sujet ne pouvait être occulté. Et donc la ministre a été sollicitée pour apporter son commentaire sur ces attaques, à travers la Toile, injustes et injustifiées à l’égard d’un membre du gouvernement algérien. Comme dans les lois arithmétiques, les réponses de Mme Toumi sont en somme logiques et ceux qui voudraient   se prêter à ce jeu pervers trouveraient de quoi méditer.
Mme Toumi a préféré revenir en détails sur les faits.  Elle rappellera   que la campagne a démarré au royaume chérifien, via le site Hibba.press.  Pour être relayée par la suite par un journal égyptien en ligne, puis sur les colonnes de la quotidienne version papier et dont le courant idéologique et l’obédience sont plus que connus. Pour la ministre, cette campagne est basée sur une lecture manipulée d’une page d’un livre paru en 1995. Mme  Toumi insiste pour dire qu’il s’agit purement et simplement de la manipulation d’une page datant de 20 ans et délibérément sortie de son propos.  La ministre de la Culture a tenu à situer les choses dans leur contexte. Elle ne s’en cache pas, et elle est fière de revendiquer et d’assumer son passé. «En 1995, j’étais une militante engagé. Une militante acharnée et déchaînée contre tout mouvement politique, ou politico-militaire utilisant l’islam à des fins politiques ou pour réprimer la pensée».
Et d’ailleurs je suis toujours fidèle à ces principes, et je ne changerai jamais.» Après ces rappels, elle a expliqué que sa réponse sera à trois variables. D’abord, diplomatique, puis politique et enfin sur le plan religieux. Sur le plan diplomatique, elle dit qu’il n’est permis à une personne étrangère,  individu, site, organisation, de « l’interpeller» en tant qu’algérienne , car comme elle le dit, elle est «souverainiste», pour paraphraser Jean Pierre Chevènement.  
«Souverainiste, parce que je connais le prix qu’a payé mon peuple pour le recouvrement de sa souveraineté.» Dans sa réplique, qu’elle veut politique, elle  s’est demandé où était ce «daia» égyptien, qui prône le «takfir» comme un subterfuge pour rendre légitime le  meurtre, dans les années 1995 où  des millions d’Algériens  tenaient tête  à «El Hidjra ou Takfir». Mais, dit-elle, à l’évidence, Hibba.press ne connait pas l’histoire de l’Algérie.
 Sinon il aurait été au courant que notre pays a vécu ses printemps, en 1980 et en 1988.  
Et c’est en amazigh, avec un passage de la célèbre chanson d’Aït Menguelet, qu’elle dira au pseudo erudit égyptien : «Dors encore, il n’est pas encore l’heure de se réveiller.»   
C’est tout dire. Comme conclusion politique, elle dit : «Qui touche à mon pays, en utilisant la religion, le football, ou autre chose, il payera.» (limess, ikhalass».  Enfin, sur le plan religieux, elle a tenu à dire à ceux qui mettent en doute ses convictions religieuses : «Nous n’avons pas de leçons à recevoir des descendants des pharaons.
Nous appartenons à des nobles, nous sommes les dignes héritiers de ceux qui ont défendu l’islam, et ont fait de l’Algérie un pays musulman.»
C’est en des termes sincères et directs, que Mme Toumi  a, au Forum culturel d’El Moudjahid,  tenu à répliquer pour la première fois officiellement à la campagne éminemment politique qui vise l’Algérie et qui continue à déranger par ses positions et par le fait qu’elle reste le pays qui a fait l’exception au vent de printemps qui a soufflé sur le monde arabe dont on connaît aujourd’hui les conséquences, les commanditaires et les plus grands bénéficiaires.  
Nora Chergui

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À propos des protestations contre le film Zabana :
“Que celui qui n’est pas d’accord réalise un autre film”
 Interpellée pour apporter un commentaire sur les déclarations et la colère des membres de l’Association des anciens condamnés à mort après la sortie du Film sur le chahid Zabana et qui sont montés au créneau au point de demander l’interdiction de sa projection, Mme  Khalida Toumi   a souligné que son département n’est pas dans son rôle d’interdire la sortie de films. En revanche, il est de son devoir d’empêcher quiconque qui appelle à l’interdiction de projection de films. Elle dira simplement que «celui qui n’est pas d’accord avec ce film n’a qu’à réaliser un autre film.  Par  la même occasion, cela permettra d’apporter un plus à la production cinématographique en Algérie».                
N. C.

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Les vertus du didactisme
“Pourquoi Constantine, capitale de la culture arabe 2015 ?» entre autres questions posées par les journalistes. Oui pourquoi Constantine ? Dans l’esprit du confrère, c’est un choix de l’Algérie. Comprendre que c’est elle seule qui décide d’instituer à sa guise ce type de manifestation comme ce fut le cas pour Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011 et Alger, capitale de la culture arabe en 2007. C’était, pour Mme Khalida Toumi, ministre de la Culture, une autre perche tendue pour faire valoir ses talents de pédagogue, elle l’ancien professeur de mathématiques.
Venue débattre avec la presse de la politique culturelle en Algérie, Mme  Toumi, didactique à souhait, a d’abord souligné qu’il faut redéfinir ce qu’est une politique culturelle avant de se prononcer et trancher à la hâte, presque sans aucune référence, avant de donner aux journalistes des adresses web des sites de référence qu’il faut consulter concernant, notamment, des textes de loi et des décrets, ceci pour mieux cerner cette fameuse politique culturelle dont il a été question durant le débat. Le fonctionnement des fonds d’aides au livre et à l’action culturelle, et celui destiné au cinéma, à la production cinématographique, mais aussi à la diffusion des films algériens et à leurs promotion ( FDATIC) et enfin le fonds octroyé au patrimoine. L’assistance a eu droit à une véritable leçon, et du coup, tout s’est traduit dans un langage simple pour que rien ne reste opaque et flou et sujet encore à des équivoques, voire des polémiques. On retiendra cette question relative au choix de Constantine. Les journalistes ne sont pas censés tout savoir si, au préalable, il y a déficit en communication et si bien sûr, ils ne disposent pas de documentation adéquate.
La ministre de la Culture a saisi qu’il y a faille, et pour remettre les pendules à l’heure, elle a affirmé tout de go qu’elle  était amazigh, mais qu’elle refuse les racismes d’où qu’ils viennent. Cela dit, elle a repris son costume d’enseignante pour rappeler que c’est l’Organisation arabe pour l’éducation, la culture et les sciences (ALESCO)  qui a proclamé la ville de Constantine, capitale de la culture arabe pour l’année 2015, et ce sur la base d’une demande de l’APW et des intellectuels de Constantine. Le dossier de candidature a été déposé par l’Algérie. C’est ce qui se passe en Europe pour l’année de la capitale de la culturelle européenne et en Amérique latine. La ministre regrettera que l’Afrique n’ait pas pour l’instant inscrit ce type de manifestation dans son agenda. Pour rappel, l’ALESCO, créé officiellement au Caire en juillet 1970, a lancé l’initiative «capitale de la culture arabe» en 1996 pour promouvoir la «culture arabe» et favoriser les échanges interarabes dans ce domaine. Sur sa lancée, Mme Khalida Toumi a indiqué que les intellectuels de Constantine ont milité pour que leur ville soit élue, capitale de la culture arabe, parce qu’ils mesurent l’apport en infrastructures que cela génère, pour ne parler que de cela, sans bien sûr occulter le volet création, car dans tous les domaines de l’expression artistique, il y a des appels à projets.
Et à la ministre d’énumérer les acquis des villes comme Alger et Tlemcen, qui ont eu à abriter des manifestations de ce genre, respectivement capitale de la culture arabe et capitale de la culture islamique. Rien que pour cet exemple d’éclairage, le forum culturel d’El Moudjahid consacré à la politique culturelle de l’Algérie aura été riche en informations. Les zones d’ombre se sont dissipées, car aucune question n’a été occultée.
Abdelkrim Tazaroute
 

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