cinema,algerie,film,scenario
Une première dans la Mostra de Venise
Pour le réalisateur italien Andrea Pallaoro, le parcours de son personnage permet d'explorer «l'univers émotionnel et psychologique de Monica...
Travestis, drag-queens, acteurs et rôles transgenres: que ce soit en compétition ou dans ses sections parallèles, la Mostra de Venise, le doyen des festivals de cinéma, met cette année sous les projecteurs la diversité des identités de genre.
Pour sa 79e édition, la Mostra propose pour la première fois en compétition un film avec une actrice transgenre dans le rôle principal, «Monica». Trace Lysette, connue pour son rôle dans la série «Transparent» sur Amazon Prime Video, y incarne une femme transgenre qui, après vingt ans d'absence, revient dans l'Ohio au chevet de sa mère mourante.
Pour le réalisateur italien Andrea Pallaoro, le parcours de son personnage permet d'explorer «l'univers émotionnel et psychologique de Monica tout en réfléchissant à la nature précaire de l'identité de chacun de nous quand elle doit se confronter à la nécessité de survivre et de se transformer».Dans ce film pudique porté par l'interprétation de Trace Lysette, le cinéaste, qui avait offert à Venise le prix de la meilleure actrice à Charlotte Rampling pour son rôle dans «Hannah», explore «la complexité de la dignité humaine et les conséquences profondes du rejet».
Dans un autre film en lice pour le Lion d'or, «L'immensità» d'Emanuele Crialese, c'est une adolescente, Adriana, qui se fait appeler Andrea (nom masculin en italien), s'habille et se coiffe comme un garçon. Acceptée comme telle par sa mère (Penelope Cruz), elle doit affronter la vision plus conformiste du reste de sa famille bourgeoise dans la Rome des années 70.
«La visibilité des personnes transgenre reste encore exceptionnelle dans le cinéma mainstream», constate le réalisateur français Sébastien Lifshitz. Mais il se veut optimiste en misant sur «la nouvelle génération», qui «se pense différemment, veut repenser le masculin-féminin et ne veut plus se sentir sous le diktat de certaines injonctions à se conformer».
Une illustration parfaite de cette tendance est la star franco-américaine de 26 ans Timothée Chalamet, qui a débarqué vendredi sur le tapis rouge du Lido revêtue d'une improbable et sensuelle combinaison rouge lamé avec dos nu.»Et j'espère en fait que cette impulsion, ce désir, vont amener une plus grande diversité de rôles et de sujets au cinéma», avance Sébastien Lifshitz, lui-même à Venise pour présenter un documentaire, «Casa Susanna», qui retrace de façon émouvante la naissance d'une communauté de travestis dans la très conservatrice Amérique des années 1950-60.»
C'est un combat depuis des décennies d'essayer de sortir des archétypes», observe-t-il, son documentaire montrant le chemin parcouru depuis l'époque où ces identités devaient être dissimulées à tout prix sous peine d'être mis au ban de la société.Grâce à des images d'archives et aux témoignages de membres encore en vie de ce petit cercle, Sébastien Lifshitz réussit à faire revivre un épisode méconnu de «l'Histoire pré-queer»
. Le combat contre le rejet et les stéréotypes est au centre du film du Français Florent Gouëlou, «Trois nuit par semaine», présenté sur le Lido en ouverture de la Semaine de la Critique. On y voit Baptiste, un trentenaire en couple avec une femme, découvrir le monde parisien des drag-queens et tomber amoureux de l'une d'entre elles, Cookie.
Refusant le voyeurisme, Florent Gouëlou, lui-même drag-queen, a voulu «faire une déclaration d'amour à cette forme d'art en prenant le point de vue de quelqu'un qui la découvre». «A travers le personnage de Cookie, vous voyez aussi ma propre expérience en tant que ‘'drag''», a-t-il raconté à la présentation du film aux côtés de ses acteurs.
Cette édition de la Mostra marque donc un nouveau pas en avant dans la représentation au cinéma de la diversité des identités de genre. L'an dernier, la sortie du film «A good man», avec Noémie Merlant dans le corps d'un homme qui tombe «enceint», allait aussi dans ce sens.En 2020, c'était Sébastien Lifshitz, déjà lui, qui apportait sa contribution à ce mouvement avec le documentaire «Petite Fille», sur le parcours de la jeune Sasha, née dans un corps de garçon et exprimant sa trans-identité.