RENCONTRES AVEC TIM BURTON
Après avoir accueilli Steven Spielberg, la Cinémathèque Française a souhaité rendre hommage à Tim Burton en hébergeant la vaste exposition qui lui fut consacrée au Musée d’Art Moderne de New York. Après plusieurs rencontres en chair et en os avec le père d'Edward aux Mains d'Argent et une visite sur le tournage des Noces Funèbres, votre humble narrateur a pu compléter son portrait du plus marginal des cinéastes hollywoodiens en recueillant quelques propos supplémentaires. Voici donc un extrait de morceaux choisis…
A PROPOS DE L'ENFANCE
« Je ne m’exprime pas très bien oralement. Dans mon enfance, je parlais tellement peu que beaucoup de gens se demandaient si je n’étais pas muet ! Pour moi, le dessin est devenu un mode d’expression idéal, un moyen d’explorer mon inconscient, de me libérer et de communiquer. »
A PROPOS DE VINCENT
« J’étais très solitaire et je me retrouvais dans les films de Vincent Price. Ils m’ont sauvé la vie, d’un point de vue psychologique. C’était un très grand moment quand il a acceoté de faire la voix de mon court-métrage Vincent. »
A PROPOS DES MONSTRES
« Plus les gens vieillissent, plus ils craignent les monstres. C’est un processus étrange. Les contes de fées sont des histoires horribles. D’une manière abstraite, ça aide les enfants à comprendre le monde. Regardez les films de Walt Disney. Les meileures scènes de Blanche Neige sont les plus effrayantes ».
A PROPOS DE DANNY ELFMAN
« Danny Elfman et moi avons fait nos débuts au même moment. Pendant qu’il jouait dans son groupe de pop Oingo Boingo, je commençais à réaliser des films. Je trouvais sa musique très cinématique, même sur scène. Or la musique joue un rôle important dans mes films. Elle permet de trouver l’équilibre entre l’humour, le drame, la fantaisie. »
A PROPOS DE BATMAN
« Les gens du studio croyaient que mon Batman serait trop noir. Mais maintenant, comparé à ce qui se fait aujourd’hui, c’est un manège pour enfants ! A l'époque, je dessinais le moindre cadrage, le moindre mouvement de caméra, le moindre regard des personnages. Aujourd’hui encore, je continue à dessiner des choses et d’autres tout au long de la préparation des films. Je fais quelques aquarelles montrant les personnages principaux. Ça m’aide dans mes recherches, c’est un processus presque organique ».
A PROPOS D'EDWARD AUX MAINS D'ARGENT
« J’ai réalisé très tôt, après quelques succès, que les films seraient plus faciles à faire. Mais Edward aux Mains d'Argent a été très dur à faire, malgré les succès deBeetlejuice et Batman. Chaque film est un combat. Ce n’est jamais facile. Une fois que j’ai compris ça, je suis devenu plus philosophe. Edward montre l'environnement balnieusard où j'ai grandi. C'est sans doute, avec Ed Wood, mon film le plus personnel. »
A PROPOS DE JOHNNY DEPP
« Quand je l’ai rencontré, j’ai su qu’il collerait parfaitement au rôle principal d'Edward aux Mains d'Argent. C’est quelque chose que j’ai senti. Dans ces cas-là, vous ne pensez pas au futur, vous ne vous dites pas : “ce sera l’acteur de la plupart de mes autres films“ »
A PROPOS DE LA STOP-MOTION
« C’est très émouvant la stop-motion. Si vous visitez un plateau comme celui de L’Etrange Noël de Mr Jack, que vous contemplez ces maquettes, ces figurines, tous ces petits objets, ça vous ramène aux origines du cinéma. »
A PROPOS D'ED WOOD
« Il y a une frontière tellement mince entre une œuvre réussie et une œuvre ratée. Finalement, qu’est ce qui est artistique, et qu’est-ce qui ne l’est pas ? C’est ce sujet que j’ai souhaité traiter dans Ed Wood. Je voulais aussi décrire la famille étrange que l’on se crée en faisant des films. Je crois qu’Ed Wood traite surtout de la désillusion suscitée par le travail créatif. »
A PROPOS DE MARS ATTACKS
« Quand j’ai réalisé Mars Attacks !, je ne me sentais pas en phase avec la dynamique de mon pays et avec les grandes décisions du gouvernement. Je me sentais moi-même comme un extra-terrestre. D’où mon envie de décrire une lutte entre ce qui semble normal et ce qui ne l’est pas. »
A PROPOS DE CHRISTOPHER LEE
« J’ai grandi avec des acteurs comme Vincent Price, Christopher Lee ou Michael Gough. Ce sont des gens étonnants. Mais à Hollywood, on a tendance à les oublier. Quand j’ai proposé Christopher Lee au studio, ils m’ont dit qu’il était mort. Je leur ai répondu qu’il était intéressant de voir ce mort jouer dans le Seigneur des Anneauxet Star Wars ! »
A PROPOS DE SWEENEY TODD
« Avec un film qui parle de meurtres en séries et de cannibalisme, les gens se doutent qu’ils ne vont pas voir La Mélodie du Bonheur ! Mais la violence du film est très exagérée. Notre sang rouge vif est plus proche des films de la Hammer que deHostel. »
A PROPOS D'ALICE AU PAYS DES MERVEILLES
« C’est l’idée de pouvoir mixer l’histoire d’Alice au Pays des Merveilles avec le relief qui m’a décidé à accepter ce projet. Ça s’adaptait parfaitement au “trip“ que vit l’héroïne dans cet univers fantastique. Je vois le relief comme un outil narratif au service de la mise en scène, à la manière de la couleur ou du son. Pour moi, ce n’est pas un gimmick à la mode mais un moyen de s’immerger totalement dans un environnement nouveau. »
A PROPOS DE FRANKENWEENIE
« Un film de ce type vous donne le syndrome de Frankenstein ou de Pinocchio, dans la mesure où des choses inanimées s’animent sous vos mains. Vous leur donnez la vie. La combinaison de la stop-motion et du noir et blanc m’excite beaucoup, parce qu’une émotion supplémentaire s’en dégage. »
A PROPOS DE DARK SHADOWS
« Dark Shadows sera une combinaison de drame, de comédie et d’horreur. Bref, un cocktail très intéressant. »
Propos recueillis par Gilles Penso