INDIGÈNES - LA CRITIQUE
Double nationalité

- Réalisateur : Bouchareb, Rachid
- Acteurs : Sami Bouajila, Jamel Debbouze, Roschdy Zem, Samy Naceri, Bernard Blancan
- Genre : Film de guerre
- Nationalité : Français
- Date de sortie : 2006
- Festival : Festival de Cannes 2006, Sélection officielle Cannes 2006
Durée : 2h
Regards croisés : lire notre critique du documentaire ayant inspiré le film : Ils étaient la France libre
Un film intègre qui revient sur un sujet brûlant et contemporain.
L’argument : 1944-1945, alors que la France commence à se libérer de la domination nazie, le parcours de quatre "indigènes", soldats oubliés de la première armée française recrutée en Afrique. Abdelkader, Saïd, Messaoud et Yassin, réputés pour leur courage, sont envoyés en première ligne. Argent, amour pour la France ou pour l’armée française, foi en la liberté et l’égalité, leurs motivations divergent pour un même combat, libérer la France, les armes à la main.
Notre avis : Des films comme Le gone du Chaâba ou même récemment Caché ont ausculté les inquiétudes d’immigrés algériens venus chercher en France une terre d’accueil mais surtout un éden. Dans un registre différent, de manière peut-être plus accessible sans tomber dans les travers humanisants d’un Joyeux Noël, Indigènes poursuit ainsi le débat en s’intéressant aux soldats Algériens qui ont soutenu la France pendant la Seconde Guerre mondiale et apporte un éclairage polémique et politique. L’ambition qui consiste à revenir aux racines pour comprendre comment fonctionne la société française actuelle est louable quand on sait à quel point, par exemple, la Guerre d’Algérie demeure un sujet tabou aujourd’hui, même si une oeuvre précieuse comme La Bataille d’Alger a courageusement traité le sujet.
Pour amplifier l’impact de son histoire, Rachid Bouchareb, producteur de Flandres, film de guerre rutilant d’un autre calibre, reprend les idées visuelles et narratives d’Il faut sauver le soldat Ryan afin de dynamiter un cinéma français trop souvent frileux au niveau formel. En dépit du cahier des charges, le traitement se veut plus choc que consensuel : c’était la condition première pour parler d’un thème brûlant qui agite les consciences. L’intrigue rend hommage aux héros anonymes relégués aux oubliettes de l’Histoire pour des motifs souvent honteux. Sans ostentation aucune, Bouchareb filme des personnages naïfs qui croient en ce qui les anime jusqu’à la déception et l’amertume. La démonstration se trouve davantage dans les personnages algériens sacrifiés sur l’autel du manichéisme ou alors divisés en archétypes. Les acteurs, uniformément excellents, ont eu la bonne idée de ne pas se détacher du beau lot. Dans le cinéma populaire (genre noble), une réussite qui ne pouvait être que collective. Toutefois, s’il sait faire fi de moralisme, Indigènes n’échappe pas toujours aux pièges de l’édification pédago et appartient à ces films pétris de bonnes intentions qu’on ne peut pas ne pas aimer.