Sorti sur le grand écran en 2005, le long métrage de fiction Douar Ensaa (Hameau de femmes) de Mohamed Chouikh, continue d’attirer les cinéphiles dans les salles obscures, comme c’est le cas à la salle El Mouggar d’Alger où le film est projeté jusqu’au 28 février, à raison de quatre séances par jour.
Ce long métrage est un drame poignant qui retrace une réalité algérienne vécue amèrement pendant la dernière décennie du XXe siècle, celle du terrorisme et ses séquelles psychologiques et sociologiques que le film illustre avec ingéniosité. Jeune fille instruite ayant abandonnée ses études universitaires, Sabrina (Sofia Nouaceur) est recueillie dans un hameau perdu au milieu de nulle part après l’assassinat de ses parents par des militants islamistes, elle découvre une population pauvre et asphyxiée par la horde terroriste. Les hommes se font recruter en usine pour subvenir à leurs besoins, ils confient leurs armes aux femmes pour se défendre durant leur absence, Ils chargent également les vieux de veiller à la vertu de ce harem, sur les us et coutumes de la femme paysanne. Mais étant armées, les femmes découvrent leur pouvoir et prennent conscience de leur statut. Le rapport de force ancestral est alors bouleversé et certains tabous sont transgressés.
Sabrina tisse une relation d’amour avec un étranger (Khaled Benaïssa), un jeune marchand de bestiaux recueilli au douar après avoir été soupçonné d’être un terroriste. Dès lors, les femmes ont réalisé des mannequins afin de faire croire que les hommes étaient toujours présents alors qu’ils étaient partis depuis longtemps à la recherche d’un gagne-pain susceptible de leur faire oublier les conditions difficiles dans lesquelles ils évoluaient. En attendant, le sarcasme et la dérision alimentent le quotidien monotone de ces femmes paysannes qui ont fait de l’humour, souvent noir, une porte parallèle pour trouver l’évasion et des bribes des rêves perdus Parmi les caractéristiques du film : le discours féministe qui marque l’émancipation éphémère des convenances archaïques car les circonstances le voulaient. Suite à l’absence des hommes, elles ont pris le pouvoir et se sont autorisées de porter des pantalons, d’assister aux funérailles alors que la religion l’interdit, et elles ont même pris le courage de défendre leurs territoires au grand dam des deux vénérables vieillards du village. En effet, à leur retour au bercail, les hommes tombent dans une embuscade terroriste. Ils ne doivent leur salut qu’à leurs femmes venues à leur rescousse avec bravoure. «Vous ne devez votre salut qu’aux femmes. Les hommes du village sont les femmes», dixit le sage du village, à l’apothéose du film. Le film d’une durée de 100 minutes a été produit par Acima film et la télévision algérienne (ENTV), le scenario et les dialogues ont été écrit par le réalisateur Mohamed Chouikh, le montage de Yamina Bachir-Chouikh, sur une musique de Khaled Barkat.
Douar Ennsa met à l’affiche des stars du cinéma algérien à l’exemple de Saïd Hilmi, Bahia Rachedi et Aïda Guechoud, ainsi que d’autres jeunes, et moins jeunes comme Khaled Benaissa, Sofia Nouaceur t Amira Ouznadji.
Kader Bentounes
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