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Le cinéaste iranien Vahid Jalilvand «La vie sans amour est une prison»
Le cinéaste iranien Vahid Jalilvand
«La vie sans amour est une prison»
«La vie sans amour est une prison», affirme le cinéaste iranien Vahid Jalilvand pour décrire «Au-delà du mur», en lice pour le Lion d'or à Venise au côté d'un opus de son compatriote emprisonné Jafar Panahi. À 46 ans, ce natif de Téhéran est un habitué du Lido, où il a remporté en 2017 le Prix de la meilleure réalisation dans la section parallèle Orrizonti de la Mostra avec son deuxième film,
«Cas de conscience». Cette année, il est en compétition avec un film puissant centré sur le personnage solitaire d'Ali, un homme aveugle dont la vie est bouleversée par l'arrivée d'une femme fuyant la police qui se réfugie chez lui. Alors qu'il était au bord du suicide, l'irruption de Leïla va peu à peu redonner du sel à son existence.»Si je voulais résumer mon film en une phrase, je pourrais dire:
la vie sans amour est une prison», confie dans un entretien à l'AFP le cinéaste, qui s'exprime en farsi et est venu accompagné d'un traducteur. Lorsqu'on l'interroge sur l'absence de Jafar Panahi, emprisonné après une condamnation pour «propagande contre le régime», il n'hésite pas un instant à prendre sa défense: «Aucun artiste ou intellectuel ne devrait être en prison, que ce soit en Iran ou ailleurs dans le monde».»La pensée ne peut pas être limitée ou contenue. L'Histoire a démontré que, chaque fois que l'on essaie de le faire, cela a l'effet inverse de celui escompté», ajoute-t-il.
Il a lui-même eu des démêlés avec le régime: en 2014, il a été écarté de la télévision d'Etat iranienne, où il réalisait des séries et des pièces depuis 1997, en raison de ses critiques contre le pouvoir. Il s'est alors lancé dans le cinéma indépendant.»Il y a différents groupes de cinéastes en Iran», explique-t-il à ce propos. «Il y a un groupe dont la production bénéficie de l'agrément des autorités et qui est susceptible de recevoir des aides gouvernementales. Et l'autre est celui des cinéastes indépendants qui ne reçoivent aucun soutien gouvernemental».
Pour ces derniers, «naturellement, le processus est plus compliqué: ils doivent convaincre des investisseurs de les financer et affronter certains problèmes avec les autorités». Il nuance cependant les difficultés rencontrées: «Il semble que, hors d'Iran, on ait l'impression que les réalisateurs sont en permanence sous pression, mais ce n'est pas le cas», assure- t-il, mettant en avant l'exemple de son film, le troisième à son actif, qui «a été tourné en Iran et a reçu toutes les autorisations nécessaires».Et ce alors que la vision de la société iranienne transpirant du film n'est en rien positive, mettant l'accent sur les injustices et les entraves aux libertés individuelles dans un système répressif.Pour cette première sélection en compétition dans un festival majeur, Vahid Jalilvand ne boude pas son plaisir d'être présent sur le Lido, se disant «très fier de représenter le cinéma iranien aux côtés des grands du cinéma mondial».
Un privilège que ne partagera donc pas son collègue Jafar Panahi, empêché par son incarcération de venir défendre les couleurs de son film «Les ours n'existent pas».
Dans une lettre au festival cosignée avec son confrère Mohammad Rasoulof, lui aussi détenu, il a accusé les autorités de son pays de considérer les cinéastes indépendants «comme des criminels».»L'histoire du cinéma iranien témoigne de la présence constante et active de réalisateurs indépendants qui ont lutté contre la censure et pour garantir la survie de cet art.Parmi ceux-ci, certains se voient interdire de tourner des films, d'autres ont été contraints à l'exil ou réduits à l'isolement», ont dénoncé les deux cinéastes dans leur missive.Artiste internationalement reconnu, Jafar Panahi a remporté le Lion d'or à Venise en 2000 pour «Le cercle» et le Prix du scénario à Cannes en 2018 avec «Trois Visages», trois ans après l'Ours d'or à Berlin pour «Taxi Téhéran».
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