• Juste un mot : De nouveau le cinéma tunisien ?

    Juste un mot : De nouveau le cinéma tunisien ?

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    le 27.03.14 | 10h00 Réagissez

     

    En retrouvant à Marseille, plus précisément au MuCem (Musée des cultures européennes et méditerranéennes), Tahar, le fidèle ami tunisien, de nombreux souvenirs, tout aussi puissants les uns que les autres, nous ont immédiatement assaillis. Nous reprenons ici l’un d’entre eux, l’après-midi passée à Alger avec Wissem. Wissem est ce jeune Tunisien qui a fait le trajet Tunis-Alger en bus il y a quelques années, pour voir des films, acheter des livres, découvrir Alger et nous rencontrer. Wissem est un jeune professeur de lettres, absolument cinéphile. Il est fier de raconter comment, malgré toutes les difficultés, il a pu créer un ciné-club dans le lycée où il enseigne, à une centaine de kilomètres de Tunis. C’est un vrai ciné-club qui fonctionne, alimenté en vrais films cinéma et non en vidéo. Wissem évoque avec passion son nouveau projet, un livre sur le cinéma algérien, parce qu’il aime nos films.

    Il réussira, c’est certain, tant il est fougueux et déterminé. C’est en lisant un article nous concernant, un peu trop élogieux à notre goût et qui nous fait quelque peut rougir, signé Tahar Chikhaoui dans la revue tunisienne Cinécrits en novembre 1994, qu’il a décidé de nous rencontrer. Et, ainsi, nous avons passé ensemble une longue après-midi au bord de la mer dans un sympathique restaurant de La Madrague qui nous accueille non seulement pour manger et boire, mais aussi pour écrire et vendre des livres. Il nous étonna encore en refusant notre invitation à déjeuner car, disait-il, j’ai mon repas sur moi, et joignant le geste à la parole, il sortit de son sac une pomme et une banane achetées au marché d’Alger proche de l’arrêt du bus qui le transporta vers nous. Il accepta tout de même une bouteille d’eau minérale que lui proposa le garçon.

    Dès le début de notre conversation, les yeux illuminés il nous dit : «Comment en parcourant, ne serait-ce qu’une partie de ce texte, quitter Alger sans vous rencontrer ?» et il s’est mis à nous lire ce passage de l’article : «Parce que le cinéma pour Boudjemaâ n’est pas un objet de discours ni la Cinémathèque une fonction. Le cinéma, c’est en lui, ça parle en lui. Et sa douleur est d’autant plus grande qu’en Algérie, le problème du cinéma n’est pas qu’il stagne ou régresse, il est menacé de disparition. Son désir est ailleurs, dans un appel à la résistance.» Nous avouons que notre fierté était grande en l’écoutant et, tandis qu’il parlait, deux faits, datant des années 1970/ 80, nous sont revenus en mémoire.

    A Tunis d’abord, lorsque Tahar Guiga, cet homme de culture, nous avait raconté avec force détails ses souvenirs d’étudiant, et tout particulièrement ses voyages à Alger en train direct, une vraie balade, pour passer ses examens. En effet, à l’époque, avant l’indépendance, l’université de Tunis dépendait de celle d’Alger, et Guiga ne quittait jamais notre ville sans avoir acheté un shangai, qu’il aimait tant porter encore.

    A Alger ensuite, lorsqu’un jeune garçon, âgé d’à peine 12 ans, s’était vu refuser l’entrée de la salle de la Cinémathèque par la caissière, Khadra, pour la séance de 22h, en raison de l’heure tardive.
    Après notre intervention pour justifier la préposée, il ne dit rien, se dirigea vers la sortie, remonta les escaliers et, arrivé en haut des marches, il se retourna lentement, le regard noir et rageur comme celui de Brahim Hadjadj, Ali la Pointe dans La Bataille d’Alger, et nous jeta la pièce de dix dinars, car tel était le prix à l’époque. Wissem est retourné à Tunis comme il est venu. Il a repris ses cours et son ciné-club et il attend avec impatience les vacances d’été pour continuer son travail à Alger pendant deux mois, avec le grand espoir de décrocher un job, même bénévole à la Cinémathèque.

    Au MuCem donc, ici on se pose la question, pourquoi le qualificatif européennes dans la définition de ce musée ? Tahar, volubile et dans une grande jubilation, avec son «dur désir de dire», tenait à nous faire croire que la Tunisie en avait fini avec le Moyen-Âge que son peuple avait commencé à s’exprimer librement et pour notre part, malgré notre tendance à l’optimisme, nous lui avons répondu que nous n’adhérerons à ta thèse que lorsque nous verrons de nouveau de grands films tunisiens et accueillerons une autre fois Wissem à Alger.

    Boudjemaâ Karèche
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