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De nos frères blessés projeté au FICA Une adaptation pâle d’un roman flamboyant
De nos frères blessés projeté au FICA Une adaptation pâle d’un roman flamboyant
Adapté du roman éponyme de Joseph Andras, le long métrage De nos frères blessés réalisé par Hélier Cisterne a été projeté lundi à Alger dans le cadre du 11e Festival international du cinéma d’Alger.
Ce qui a fait l’éclat et l’intensité du roman d’Andras, c’était la sublimation formelle d’une histoire militante, celle de Fernand Iveton, communiste algérien guillotiné par les Français. C’est cette réappropriation esthétique brillamment réussie par l’écrivain qu’on ne retrouvera pas dans le film de Hélier Cisterne projeté à la salle Ibn Zeydoun en compétition officielle du 11e Festival international dédié au film engagé.
Beaucoup connaissent
l’histoire : le militant communiste Fernand Iveton rejoint très vite le combat des Algériens pour l’indépendance. Après l’assassinat de son meilleur ami Henri Maillot, il décide de passer à l’action. Opposé à l’atteinte aux vies humaines, il choisit le sabotage et dépose une bombe dans l’usine française qui l’emploie, mais de manière à ce qu’elle explose sans tuer personne. Son plan est découvert, l’engin désamorcé et Iveton se fait arrêter, torturer, juger dans un procès expéditif et guillotiné sur ordre de Mitterrand, ministre de la justice à l’époque.
Avant ce tragique dénouement, Fernand filait le parfait amour avec Hélène qui s’est installée avec lui à Alger : malgré l’oppression et la colère chevillée au corps face à une occupation cruelle, ils se créaient leur marge heureuse faite de tendresse et de sensualité.
Hélier Cisterne choisit donc d’alterner entre des flash-back ensoleillés et insouciants et le présent glacial et pesant du procès d’Iveton. Ce dispositif étriqué, appuyé par une mise en scène ultra-classique et piégée par ses platitudes, produit une espèce d’antithèse formelle du roman d’Andras.Quand ce dernier crée, autour de ses deux personnages, grâce à un texte aussi tranchant que raffiné, une puissante émotion englobant et transcendant le frisson premier face aux injustices et aux corps mutilés des combattants, le réalisateur a tôt fait de tomber dans l’hagiographie et les représentations superficielles de ce qu’est le militantisme, le sens de la justice, le martyre… Malgré la performance convaincante de Vincent Lacoste et Vicky Krieps dans les rôles principaux, le film ne parvient que très rarement à donner à ses personnages l’épaisseur et la complexité qui sont les leurs et finit par les embourber dans un schéma érodé.
Par ailleurs, cette projection était également l’occasion de découvrir que la censure «morale» sévissant habituellement à la télévision algérienne vient d’avoir raison du Festival du film engagé. Ce dernier, ayant toujours respecté l’intégrité des films sélectionnés, semble avoir cédé cette année : De nos frères blessés a été amputé d’une scène d’amour entre Iveton et Hélène !
à notre connaissance, ce phénomène a jusque-là relativement épargné les festivals, ce qui provoquait régulièrement des polémiques chez la presse conservatrice et une partie du public, alors que les salles de cinéma tenaient le cap malgré tout.
Sarah H.« Festival international du cinéma d’Alger Place aux compétitions!1e FICA côté Doc Maquis des armes et des ondes »
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