• Dans la cour de Weimar

    Dans la cour de Weimar

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    le 18.02.14 | 10h00 Réagissez

     
	Scène du film Die Geliebten Shwestern.

    | © D. R.

    Scène du film Die Geliebten Shwestern.

     

    Dernier tournant avant l’Ours. Mais on voit mal qui va décrocher l’Ours d’or après avoir, ces dernières heures, vu tant d’images, mais pas la moindre trace de cinéma, d’idée ou de mise en scène. Ou bien si on était à la place du jury, ce sont les cinéastes de talent : Resnais, Bouchareb, Lou Ye, Anderson ou encore l’Allemand Dominik Graf auxquels il faudra penser pour l’Ours tant convoité l Leurs films étaient montrés dès le début de la compétition.

    Berlin (Allemagne)
    De notre envoyé spécial

    Dominik Graf a fait un très beau film, très dense et très riche qui se passe à Rudolstadt en 1788, un portrait du poète Friedrich Schiller. Ce dernier, contemporain et ami de Goethe, était aussi philosophe et auteur dramatique. Il se sentait proche de Rousseau, Homère,Virgile, Shakespeare. Il était attiré par la philosophie des lumières. Schiller était aussi un vrai rebelle. Quand sa famille voulait le destiner à une carrière militaire, il a coupé les ponts et choisi d’écrire. Ses écrits ont parfois secoué la cour de Weimar, parce qu’il dénonçait les préjugés de caste, les inégalités sociales, les abus de pouvoir. Il se sentait proche de la Révolution française de 1789 et pour cette raison, il fut nommé citoyen français.

    Le film de Domink Graf s’intitule Die Geliebten Shwestern (les sœurs bien-aimées), et c’est vraiment très beau à voir sur écran avec des décors et des costumes magnifiques. L’histoire commence en 1788, Schiller, encore tout jeune et un peu vagabond, rencontre deux sœurs très belles, très intelligentes, membres de l’aristocratie de Thuring. La sœur ainée s’appelle Caroline et a déjà fait un mariage arrangé avec un noble très riche afin de maintenir le rang de sa famille. Mais Caroline n’est pas heureuse en mariage. Elle écrit des romans de manière anonyme, qui ont beaucoup de succès et sont lus dans les salons. L’autre sœur s’appelle Charlotte, une splendeur, plus jeune et plus réservée, tombe amoureuse de Schiller et finit par l’épouser. Le poète est encore pauvre, mais déjà célèbre et en plus c’est l’amant de sa sœur Caroline !

    Là, à ce stade du récit dont la narration est extrêmement bien menée, réservant chaque fois beaucoup de suspense, on est au cœur de l’histoire d’un curieux ménage à trois, avec des relations compliquées, des tensions soudaines, des passions sensuelles et surtout une inspiration poétique très forte qu’on retrouve dans les poèmes de Schiller et les écrits de Caroline, sa maîtresse.

    Le film de Domink Graf montre très bien la vie culturelle de la cour de Weimar, les ateliers d’imprimerie (une invention allemande), les feuilles de papier qui sortent des machines, les lettres qui circulent, les cabinets de lecture, les conférences de l’université. Et dans cette œuvre d’époque, il y a un admirable et minutieux travail de reconstitution du cadre de vie de l’aristocratie allemande au XVIIIe siècle, avec les costumes splendides, l’ameublement raffiné, les beaux tissus et objets de vaisselle. Dominik Graf a su rendre au cinéma cette ambiance riche, spirituelle, très cultivée de la cour de Weimar. Schiller est joué par Florian Stetter. Les deux sœurs sont interprétées par Hannah Herzsprung (Caroline) et Henrietta Confurius (Charlotte). Les trois acteurs sont pétillants de vie et très crédibles. Bref, le film de Dominik Graf est un événement heureux dans le programme du Festival de Berlin.

    Hélas, ces dernières heures de la compétition, on a vu énormément de gâchis. Praia do Futoro, tourné à Fortaleza et Berlin, par le Brésilien K. Aïnouz, est un navet absolu, indigeste, le manque de talent poussé à l’extrême. Startos, du Grec Yannis Economides a vu la séance de presse se vider dès les premières minutes, tellement cette histoire de tueur à gages détraqué est une grosse erreur dans la compétition. Sur la guerre d’Afghanistan, pauvre film aussi de F. Alladag (Allemagne), à fuir rapidos. Et c’est presque la fin. En espérant que le jury choisira les meilleurs.

    Fesival du film de Berlin : Ours… mal léché

     

    Exit Two Men in Town et d’autres productions aussi dignes d’un mauvais palmarès dévoilé samedi soir au terme du 64e Festival de Berlin. On notera le sauvatage in extremis du film de Resnais et celui de Lou Ye dans la catégorie des Ours d’argent. L’Ours d’or revient à un film de Hong Kong glauque, thriller extrêment violent,  avec des morceaux de cadavres éparpillés partout, histoire très sombre et déprimante à suivre : Black Coal,Thin Ice, de Diao Yinan. Le jury présidé par le producteur américain James Shamus n’a pas été capable de mentionner le très beau film allemand de Dominik Graf sur la vie du grand poète Friedrich Schiller. Ni ses deux belles actrices qui méritaient largement des prix d’interprétation. Curieux palmarès qui banalise la violence la plus insoutenable. Et oublie aussi le film très maîtrisé de Bouchareb, avec l’excellent acteur Forest Whitaker. C’est donc l’échec d’un palmarès qui ne prime pas le meilleur cinéma. (A. M.)

     

    Azzedine Mabrouki
    « JOURNÉES DE LA PHOTOGRAPHIERegard singulier sur les gares »
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