En 1961, l’ANC (African National Congress) engage un mouvement de résistance pour résister au régime d’apartheid en Afrique du Sud mis en place en 1948. C’est à ce moment-là que se rapprochent les combattants de l’ANC et ceux d’un autre pays qui lutte pour son indépendance : l’Algérie. En 1961, Mandela rencontre au Maroc le docteur Moustapha Chawki, un membre du GPRA en exil. Mandela et Chawki eurent de longues discussions sur les convergences des deux révolutions, celle menée par l’ANC en Afrique du Sud et celle du FLN contre le colonialisme français. Pour Mandela, la symétrie était évidente.

Nelson Mandela au Maroc en 1962

En 1962, Nelson Mandela est invité à Alger par le président Ahmed Ben Bella pour une parade militaire. C’est à ce moment que le premier président de la République algérienne indépendante propose à Mandela de soutenir financièrement son parti, l’ANC, et d’installer en Algérie des camps d’entraînement pour la rébellion sud-africaine anti-apartheid.

Nelson Mandela avec les chefs historiques de la Révolution, en mars 1962, après le cessez- le- feu, à la base 15 d’Oujda. On y voit de gauche à droite : Hocine Aït Ahmed, Kaïd Ahmed, Mohamed Boudiaf, Djelloul Melaïka, Rabah Bitat, Nelson Mandela, Ahmed Ben Bella, Commandant Nasser, Hamilcar Cabral, Houari Boumediene, Abdelaziz Bouabdallah et Taïbi Larbi.

Par la suite, les visites de Mandela en Algérie furent tenues secrètes. « Le ministre de la Défense de l’époque, le colonel Houari Boumediène avait ordonné de ne pas divulguer la présence de Mandela en Algérie. Seul un petit groupe d’initiés savait que le héros de la libération de l’Afrique du Sud était en Algérie », se souvient l’ancien ambassadeur d’Algérie en Afrique du Sud, Nourredine Djoudi. Comme Nourreddine Djoudi parlait anglais, il fut très utile à Mandela lorsqu’il venait en Algérie où il lui servait d’interprète.

Accusé de sabotage et de complot contre l’Etat, Mandela est condamné à la prison à vie lors du procès de Rivonia en 1964. Alger continue pourtant à soutenir clandestinement l’ANC. Sur le plan militaire, à partir de 1965, plusieurs militants de l’ANC viennent secrètement en Algérie pour s’entraîner afin de mener des opérations militaires. Une bonne partie d’entre eux reçoivent d’ailleurs une formation à la prestigieuse école militaire de Cherchell. Sur le plan politique, l’Algérie a ouvert à l’ANC un bureau d’information dans un grand appartement à la rue Larbi Ben M’hidi, non loin de la place de l’Emir Abdelkader. Ce bureau était occupé par de grandes personnalités de la lutte contre l’apartheid comme Robert Reisha ou le responsable des relations extérieures de l’ANC, Johnny Makatini. C’est souvent à partir d’Alger que l’ANC faisait partir des communiqués dénonçant les violences faites au Noirs par le régime de l’Apartheid ou les actions engagées contre lui.

De nombreux membres de l’ANC venaient alors régulièrement à Alger. L’actuel président de l’Afrique du Sud, Jakob Zuma, ancien compagnon de lutte de Mandela, a toujours rappelé le rôle prépondérant de l’Algérie dans sa lutte contre l’apartheid et son soutien permanent à l’ANC. Zuma, qui s’est rendu plusieurs fois en Algérie dans les années 70 et 80, a même un moment possédé un passeport algérien ! L’action diplomatique de l’Algérie en faveur de l’ANC fut elle aussi capitale. Lors de l’Assemblée générale de l’ONU de novembre 1974, c’est grâce au rôle joué par Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères, que l’Afrique du Sud fut exclue des travaux de l’Assemblée. Suite à cette humiliante défaite, le régime de l’apartheid n’envoya plus jamais aucun représentant à l’ONU jusqu’à sa chute.

En février 1990, Nelson Mandela est libéré après 27 ans de prison. Dès sa sortie, il devient une icône planétaire, pour son combat contre l’apartheid bien sûr, mais aussi parce qu’il symbolisait les luttes de tous les peuples pour leur libération. En mai 1990, c’est à l’Algérie que le futur président de la nation « Arc-en-ciel » consacre sa première visite dans un pays étranger.

Nelson Mandela en 1990 devant le Maqam Chahid avec Sid Ahmed Ghozali, alors ministre des Affaires étrangères (gvt Hamrouche).

Au cours de ce voyage, il réclame des nouvelles de Ben Bella ainsi que d’autres personnes qu’il avait connues au cours de ses années d’entraînement en Algérie, notamment le «docteur Mostefaï» (alias Chawki) et «Djamel» (alias Cherif Belkacem). Nourreddine Djoudi, ancien ambassadeur d’Algérie en Afrique du sud, se souvient : « Lors de sa première visite, après sa libération et avant son élection, sa première demande en arrivant à l’aéroport Houari Boumediene a été formulée ainsi: « Où sont les officiers qui m’ont formé ? » Il entendait par là Chérif Belkacem, et moi-même. » Le souvenir de ses années passées en Algérie a toujours été très fort. Lors d’un meeting à la salle du Comité Olympique, lors de ce même voyage, Nelson Mandela a ainsi déclaré : « Je suis le premier sud-africain à avoir été entraîné aux armes en Algérie. Quand je suis rentré dans mon pays pour affronter l’apartheid, ajoute-t-il, je me suis senti plus fort ». Et il ajouta : « C’est l’Algérie qui a fait de moi un homme ».

Les Algériens ne l’oublieront jamais…

Un excellent blog sur l’histoire de l’Algérie à consulter ici.

Photos de Nelson Mandela en Algérie à voir ici.